Le week-end n’est pas fini qu’il est déjà riche en événements. Ca aura commencé samedi très tôt avec un retour post-apéro d’anniversaire où mon vélo aura commencé à faire des bruits bizarres, puis un bruit indiquant clairement que quelque chose n’allait pas. Ca faisait plusieurs jours déjà que les vitesses arrière n’étaient plus bien alignées et je sentais quelque chose venir. Mais à une certaine heure, on a juste envie de dormir, et comme j’étais pas loin de la maison, j’ai juste posé le vélo en me disant que je regarderai au réveil. Et au réveil, j’ai regardé.

Au registre des pièces de vélo que j’ai inhabituellement cassées au cours des années, il y avait la chaîne, la pédale, les roulements à bille de la fourche, et il y a maintenant l’axe de la roue arrière. Ca expliquait bien le boucan infernal que faisait le vélo à la fin. Et donc, en voyant ça, la question évidente, c’est « Et maintenant, je fais quoi ? »
Je me souviens d’une discussion assez vive avec Phèdre qui, en bonne minimaliste, me demandait pourquoi est ce que j’avais deux vélos à la maison alors que je n’en utilisais qu’un seul. La réponse est là : le second sert à prendre le relai du premier en cas d’accident de ce type. En l’occurrence, comme je dois encore changer les freins du second, j’ai juste échangé les roues arrière. Elles ne sont pas super bien alignées au niveau du dérailleur, mais ça fait l’affaire le temps de trouver une solution plus pérenne. Une solution plus pérenne qui devait attendre, parce que samedi, j’avais un déménagement, et je me voyais mal dire à Kemal « Je peux pas venir, j’ai cassé mon vélo ». Ca fait un peu cliché du type qui ne veut juste pas venir.
Et des fois je me dis qu’il faudrait que j’arrête d’aller à tous les déménagements où je suis gentiment invité. Parce que depuis 15 ans que je connais Kemal, par exemple, et pour l’avoir déjà déménagé à son appartement actuel (au 5ème sans ascenseur), je savais très bien ce qui m’attendait. Kemal et sa famille sont tout sauf des minimalistes. Samedi, le but était de transbahuter les cartons à leur destination, pour qu’ils aient de nouveau la place de faire d’autres cartons. Et on se demande comment tout ça tenait là au départ… Quand on s’est retrouvé à descendre les cartons de 30kg de comics que je me souvenais avoir monté à l’époque, j’ai comparé ça au fait de confronter une personne au serial killer qui aurait tué ses parents sous ses yeux étant enfant. Un vague sentiment de terreur et une défiance certaine.
Alors pourquoi est-ce que je m’inflige ça ? Parce que comme avec tous mes amis, j’aime Kemal. Et j’aime aussi toute sa famille. Ils font partie de cette catégorie de personnes pour qui je donnerai un rein sans réfléchir. Et donc je les déménage sans y réfléchir non plus. De toute façon, c’est la chose à faire, alors pourquoi y réfléchir ? Au delà de l’amour que je lui porte, Kemal est quelqu’un de fascinant, qui évolue dans une monde qui est très loin du mien, mais qui est tellement appréciable par sa diversité que j’ai toujours plaisir à m’y confronter.
Et puis il y a la petite histoire qu’il avait déjà utilisée à son dernier déménagement. Après les deux premiers trajets, alors que la quinzaine de personnes présentes (que je ne connaissais absolument pas) étaient à table, et que ça discutait du programme de l’après midi, quelqu’un a évoqué la possibilité de vider la mezzanine. Kemal s’y est opposé, parce que la mezzanine était remplie de ses précieuses figurines, et, debout devant l’assemblée, il ajoute « Il n’y a qu’une personne en qui j’ai assez confiance pour déplacer mes figurines, c’est Benoit, personne d’autre ne touchera mes figurines », dit-il en me pointant du doigt. Moi qui avait espéré me fondre dans l’arrière-plan et dans le bruit de fond, c’était foutu, tous les yeux étaient braqués sur moi à cet instant. J’étais évidemment pas à l’aise, mais c’est toujours amusant de se retrouver face à une situation qu’on n’aime pas spécialement.
C’est aussi pour ça que je m’attends à avoir un coup de fil de lui dans la journée, pour demander si je peux passer pour lui filer un coup de main (justement avec les figurines, je pense) aujourd’hui. C’est normal, je lui avais dit que je m’étais réservé le week-end pour l’aider, et il sait qu’il peut compter sur moi. De toute façon, j’ai eu le temps hier soir d’aller en vitesse racheter une roue arrière, faire installer mes anciens pignons dessus, et réparer complètement le vélo. Donc je suis prêt à en découdre.