L’impermanence des choses

Sans que je sache trop pourquoi, ma mémoire aime bien me rappeler mes pires souvenirs, en ce moment. C’est pénible, ça me fait parfois grincer des dents, à l’occasion ça m’a même écourté une nuit de repos bien méritée. Ca m’amène souvent à imaginer comment les choses se seraient passées si j’avais agit autrement. Mais je crois en avoir déjà parlé il y a plusieurs années, même si par miracle j’en avais le pouvoir, j’aime à croire que je ne changerai rien. Parce que c’est toutes ces expériences, parfois bonnes, parfois moins, qui m’ont amené là où je suis aujourd’hui. Et si j’ai encore bien des choses à améliorer, globalement, je suis plutôt content de ce que je suis devenu.

Mais, le changement, c’est bien !

Je n’ai de cesse de rappeler à qui veut l’entendre qu’apporter des changements dans sa vie (dans le présent, hein, ne revenons pas sur le passé), c’est quelque chose qui me semble essentiel. Et j’ai pas honte de dire que je suis persuadé que cette culture du changement a contribué à faire de moi quelqu’un de meilleur.

Alors OK, on n’est pas non plus obligé de tout révolutionner. Parfois, juste des petits changements suffisent. La problématique, d’après moi, et d’après ce que je vois très souvent autour de moi, c’est que les gens ont une réaction instinctive de rejet face au changement. C’est au boulot que c’est le plus flagrant, où quand un nouvel outil est introduit dans l’écosystème de ce qu’on utilise, les collègues commencent tout de suite par lister toutes les raisons pour lesquelles il est préférable qu’on utilise les anciens outils plutôt que d’en changer. Même quand de façon évidente, ils se raccrochent à des habitudes qui sont tout sauf optimales. Mais c’est comme ça, et d’une certaine façon, c’est naturel, le changement fait peur.

Oui mais voilà, le changement est inévitable. Il intervient qu’on le veuille ou non. Parfois par petites touches, parfois comme une grande claque dans la gueule. Et rarement au bon moment (s’il y en a un). Rien n’est fait pour durer, d’où ce terme d’impermanence qui me revient souvent à l’esprit. D’où l’importance de s’y préparer ; non, pas à un changement spécifique, mais au changement de manière générale. Parce que je suis persuadé qu’à changer consciemment des choses dans sa propre vie, c’est justement lutter contre cette peur du changement qui paralyse les autres.

Changer ? Pourquoi faire ?

Mis à part l’aspect simpliste de ne pas tout le temps râler quand quelque chose change, je trouve que cet état d’esprit pousse à la remise en question, mais aussi à la créativité. Typiquement, les deux choses qui manquent à beaucoup de gens, et sur lesquelles j’ai essayé de baser ma propre évolution…

Mais pour marcher, ça implique d’avoir une approche bienveillante du changement. Je peux questionner mes comportements passés, les actions entreprises (ou pas) précédemment, ça ne veut pas dire que mes choix à ces moments là méritent que je me morfonde dessus. Bien souvent, il faut remettre les choses dans leur contexte pour comprendre que tout ça avait une explication au moment de sa survenance. Une logique que l’expérience du changement nous fait voir autrement après coup. A la relecture, c’est pas rare que je me dise « mais quel con… ». Mais je trouve aussi une certaine sagesse à me dire que même les conneries que je faisais étant ado n’étaient pas vues comme des conneries, plutôt comme l’action à mener. Que rétrospectivement ça soit une bonne action ou non importe moins que de la compréhension qu’on en a aujourd’hui, et l’acceptation que peut-être demain on verra les choses encore autrement. Sans nous empêcher pour autant d’en tirer des changements concrets pour aller dans le bon sens.

Qui plus est, cette culture du changement peut aussi avoir le don de nous aider à réfléchir autrement, et à sortir du cadre (un petit exercice que je donne généralement à mes binômes). Parce que quand on accepte le changement naturellement, on a plus de facilité pour voir toutes les pistes que d’autres n’ont même pas imaginé explorer. Parce que justement, comme on va chercher le changement, on a plus de facilité à l’imaginer.

Et pourtant…

C’est à peu près à ce niveau là que les gens qui me connaissent bien doivent se dire « wait, c’est pas un peu l’hôpital qui se fout de la charité ? » Il faut dire que je suis aussi connu pour ma quantité de petits rituels, et parfois mon incapacité à arrêter une tâche en cours alors qu’on me dit qu’il est possible de faire plus simple (si ça semble trop précis pour être anecdotique, c’est parce que c’est tiré de faits réels). Et oui, il y a de ça. Un peu. Probablement beaucoup.

Mais comme je l’ai dit, pas besoin de changements révolutionnaires. Pas besoin que ça soit l’anarchie la plus totale pour intégrer le changement. Au tout début par exemple, j’avais commencé par changer régulièrement de distribution linux. C’était une façon comme une autre de modifier un paradigme dans lequel j’étais installé. J’ai arrêté de le faire quand j’ai trouvé moins drôle de réinstaller complètement mon système tous les quatre matins. Mais j’ai changé d’autres choses au fur et à mesure. N’en déplaise aux personnes qui me connaissent, je change mes habitudes ! Mes rituels du matin et du soir par exemple n’ont rien à voir avec ce qu’ils étaient quand je les ai mis en place. J’ai adapté, changé par petites touches ce qui devait l’être, même si c’est plus par réflexion de ce qui marchait ou ne marchait pas que j’ai changé, plus que par simple volonté de changer.

Ca ne peut pas être aussi simple…

Rien n’est jamais simple, évidemment. Et s’il n’est pas toujours simple de changer ses habitudes, il faut dire ce qui est, c’est pas simple non plus de vivre avec cette culture du changement ancrée en permanence. Parce que finalement, la plupart des choses qu’on voit, c’est ce qui pourrait être changé. Chez nous et chez les autres. Mais on n’a aucune prise sur les autres.

Combien de fois ça m’arrive d’aller chez quelqu’un, et de laisser vagabonder mon esprit à comment je ferai les choses autrement. C’est naturel, ça arrive à tout le monde ou presque, me direz-vous. Peut-être, mais j’ai l’impression de le faire quelques levels au dessus de la moyenne. Des fois j’ai l’impression que tout ce que j’ai à dire, c’est ce qui pourrait être changé, et qu’au delà de ça, peu de sujets ont de la substance. J’ai appris à me taire, à parler d’autre chose, même si je me perds souvent dans mes pensées. Je fais illusion.

Mais comme je l’ai dit au début, si je pouvais changer tout ça, je ne le ferai pas (paradoxalement), parce que c’est tout ça qui fait ce que je suis, qui fait mon charme (ou mon absence de charme). Après tout, comme disait un grand philosophe : « The things that make me different are the things that make me.« 

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4 commentaires

  1. Avec le recul que me donne le fait d’être plus âgée que toi je ne peux qu’applaudir des deux mains. Oui et oui, le changement. Et je vais même ajouter qu’en ce qui me concerne les meilleurs changements n’ont pas forcément été ceux que j’ai initié de moi-même, mais ceux que j’ai subis, parfois en freinant des deux pieds pour m’apercevoir que finalement le changement, c’est super bien. Comme toi j’ai de petits rituels, de petites habitudes dont j’ai parfois du mal à me départir, mais comme les enfants qui apprennent à marcher, il faut savoir lâcher la rambarde et se lancer. Mais cette réflexion n’est pas donnée à tout le monde comme tu as pu le constater toi-même, et je te renvoie à la question du HPI dont je crois t’avoir parlé dans un mail que je t’avais envoyé il y a déjà quelques années 🙂 Professionnellement aujourd’hui je suis « change manager », je te laisse imaginer comme je trouve ça rigolo !

    1. Je ne me suis jamais posé la question du HPI, d’abord parce que je ne crois pas que ça changerait quelque chose d’avoir cette étiquette ou pas, et surtout parce qu’aujourd’hui, c’est un peu l’étiquette qui est délivrée à beaucoup (d’enfants surtout) moyennant le prix de la consultation… Ca a perdu sa valeur, je trouve.
      J’ai pas un titre aussi flamboyant que « Change manager », j’avoue 🙂 Ceci dit, mon boulot de maîtrise d’ouvrage m’amène à gérer le changement que d’autres voudraient imposer (et en ce moment, à le combattre, parce que parfois il est fait avec les mauvaises bases).

      1. Je suis comme toi pour ça aussi, je fuis les étiquettes, les cases, et du reste je garde mes étiquettes pour moi, mon entourage n’en sait rien. Mais comprendre comment on fonctionne et mieux encore, pourquoi, c’est un plus non négligeable.

        1. Mais est-ce que le fait d’avoir cette étiquette HPI (ou de ne pas l’avoir) m’aiderait à comprendre comment je fonctionne ? J’ai plus tendance à croire en ma capacité d’introspection.

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